4h49mn28sec Genève
Un instant de bascule
Vers une fin d’hiver
Étonnamment précoce
Phénomène bissextile
Pour un équinoxe
Du printemps avant le temps
Dans l’attente du jour
Un doux flottement nocturne
Enrobe nos pensées
Encore engourdies de sommeil
Bientôt surgira
La première des douze heures
De lumière promise au quotidien
Jusqu’en juin
Enchantement
Douceur Joie
Bienvenue à toi
Vingt
Mars
Deux
Mille
Vingt
publié le 20 mars 2020
Par Anouk Dunant Gonzenbach
La nature en liberté
Aller courir seule et ne croiser personne ou alors faire un détour de deux mètres, ça a l’air ok, alors je continue. Tôt le matin. La première personne que je vois au loin, un collaborateur de la Voirie qui vide des poubelles jaunes. Je pense qu’on devrait aussi les inclure dans les applaudissements de 21h, les employés de la Voirie. Les poubelles ne peuvent pas s’accumuler. La salubrité publique en dépend.
J’atteins le bord du Rhône. En une heure, j’aurai croisé cinq personnes, de loin. Trois au visage fermé, imperméable à tout bonjour de loin, regardant droit devant imperturbablement. Et deux femmes à intervalle de vingt minutes, qui courent aussi, on se fait un sourire, et dans ce sourire il y a tout. Rarement vécu un tel sourire.
Les oiseaux s’en donnent à cœur joie. L’impression est plus puissante que jamais : ils n’ont pas besoin de nous, la nature n’a pas besoin de nous, juste là sur ce petit chemin de terre pas très urbain mais pas loin, on entend les pics, plus les avions. Les piverts font résonner les troncs, rien n’interfère.
Un ciel vide de machines et de bruits de moteurs. Les milans qui planent. On disait jusqu’à vendredi passé que la poésie est ce qu’on peut entendre dans le bruit, dans le vacarme du quotidien. Là, la poésie explose sur le sentier, sur le fleuve, le long des troncs, en silence.
Brièvement. Car le retour au bitume n’est pas très poétique, il y a cette fichue réalité qu’on ne sait pas comment appréhender.
Les oiseaux, eux, continuent de chanter. Le bruit du printemps, le vrai.
publié le 19 mars 2020
Des dessins pour les personnes isolées
Tout le week-end, ça a cogité dans un collectif d’ado. Que faire depuis la maison comme action solidaire ? Les téléphones portables surchauffent, rien d’exceptionnel pour cette génération en mode je reçois 56 messages à la minute sur chaque groupe Whatsapp et il n’y en a pas qu’un.
Les personnes âgées isolées dans les EMS, qui ne peuvent plus recevoir de visites et dont les activités sociales sont supprimées, les touchent. Que faire ? Objectif: créer du lien entre générations, garder les liens, colorer les murs.
Première idée, récolter par la poste des dessins, textes ou poèmes réalisés par des enfants (au sens large) à une adresse centrale et les répartir ensuite entre les différents EMS du canton. Mais deux problèmes surgissent assez vite : le soucis de ne pas surcharger la poste et la contamination du courrier papier.
Réorientation technique, le virtuel a du bon : chaque production d’enfant peut être scannée ou photographiée puis versée sur un Drive ou envoyée à une adresse email.
Les documents sont alors ouverts, convertis en formats un peu standardisés et facilement imprimables, et une fois prêts, transférés dans un second Drive, en deux dossiers : dessins et textes, accessible par les EMS. Le dossier « texte » est également ouvert en lecture à tout le monde.
Avant de tout mettre en place, il fallait s’assurer de la faisabilité de la chose. Qu’en pensent les institutions?
Le collectif connecté et motivé a ainsi contacté les 60 EMS du canton, dont la plupart se sont déclarés partants pour le projet, qui implique quand même un travail d’impression pour eux à l’arrivée.
Et c’est parti ! Mais qui va produire les dessins et les textes ? Le relai se fait par les scouts. Chaque meute (une vingtaine de groupes d’enfants de 8 à 12 ans) est contactée par l’intermédiaire de son ou sa responsable. Ce qui représente un vivier de tas d’enfants confinés à la maison (et hop une activité de plus pour eux, c’est win-win). Mais chacun.e peut participer.
Des couleurs et de l’imagination ! Aucun risque de pénurie.
Les dessins, textes ou poèmes seront imprimés par les EMS et affichés ou distribués aux résidents.
Pour participer :
envoyer les documents par mail à : scouts.groupetanganyika@gmail.com
ou directement dans le drive :
Pour les dessins : https://drive.google.com/folderview?id=1CU8G_cl6YaoUNvVPWVkzCeX_ou7Ck26A
Pour les textes: https://drive.google.com/folderview?id=1AScAMm_nPSMJSuwIjtkLTYV26NvjpIIO
Pour consulter les textes: https://drive.google.com/folderview?id=1ATgpRMFrNPBN1Oic0QM3pM0WUAukbVAZ
Podcast réalisé par LibrAdio sur le projet
18 mars 2020
Pour eux, ados, ça sonne en premier comme la fête du slip, la voie royale aux écrans, les cahiers sous le tapis et les contraintes au feu. Au bout de huit heures de ce régime le premier samedi, on découvre que la génération censée n’aimer que vivre dans le virtuel se désespère déjà à l’idée de ne pas voir ses copains en vrai, comme dit ma copine Magali. Surtout avec le soleil. Et déjà ça, c’est une bonne nouvelle.
Alors ils hululent d’ennui de l’autre sur le canapé. Parce qu’en ce premier samedi de confinement, on commence à s’être mis d’accords entre parents les plus méchants du monde du quartier : pas de copains en vrai jusqu’à nouvel avis. Juste une promenade avec Maman. Coup dur. Va falloir tenir bon, rester à la maison, on tient bon. Ce n’est pas un jeu.
Le dimanche, on se dit qu’un plan d’attaque pour les jours à venir doit être mis en place. A se téléphoner frénétiquement entre affreux adultes qui craignent de voir la morphologie d’un élève à l’arrêt complètement muter. Donc on conclut qu’il va falloir structurer. Plan confinement. Une page avec des plages horaires (lecture – devoirs – bricolages – écran). Certaines familles ont mis en place une charte. C’est comment, chez vous?
Le lundi, le premier jour de pas d’école à Genève commence. Et là, immense coup de chapeau aux enseignant.e.s, pour le cycle et le collège, les devoirs commencent à arriver. Les parents sont contactés dès le matin. Des exercices de maths préparés à cet effet sont mis en ligne.
Tenir bon, rester à la maison (pour les personnes qui ne sont pas au front – et qui ont la chance d’être et d’avoir des enfants en bonne santé), le mieux possible. Donc continuer à structurer les journées, non, ou bien?
17 mars 2020
Dans les situations extrêmes, il ressort le pire et le meilleur des personnes qui y sont confrontées. Il arrive aussi le pire, largement documenté dans les médias. Mais où lire, où voir le meilleur, ou comment faire quelque chose de joli ou agir utilement ? Surtout si agir, c’est rester à la maison ?
Alors on s’est dit, pourquoi pas une série de billets sur des évènements positifs, des idées d’actions à distance, de questionnements sur la structuration du temps de nos enfants et ados plongés dans des sortes de vacances qui n’en ont pas le nom, sur le ralentissement du temps, la poésie, la poésie, la poésie…
Un nom de blog ? petit brainstorming par SMS. Tousensemble.ch, notcancelled.com, laviecontinue.ch, en vers et contre tout, envers et contre toux, les choses simples, vivre demain, im_moment.berset…
Pour finir, virusolidaire. Parce quand on se sera relevés de ce virus, on pourra continuer à utiliser le mot dans sa conception positive, du style ah t’as attrapé le virus de la musique, de la lecture et tout ça.
Et parce que solidaire, y’a pas mieux que la définition du Petit Robert : se dit des personnes qui sont ou se sentent liées par une responsabilité et des intérêts communs. Se dit de choses, de mécanismes qui dépendent l’un de l’autre, qui fonctionnent ensemble.
Anouk Dunant & Frédéric Favre
15 mars 2020
